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"Quand "frère d'arme" prend tout son sens..."

Photo du rédacteur: AdministrationAdministration

Chaque mort dans nos rangs est une véritable tragédie. A chaque fois, nous nous devons de rédiger un communiqué pour rendre hommage au camarade disparu. Cette fois-ci, j'ai laissé la main et ma participation à ce recueillement n'arrive que maintenant. Il y a des décès qui marquent plus que d'autres et celui-ci m'affecte plus particulièrement.

Alain et moi sommes de la même promotion à Montluçon, la 251ème de la 5ème Compagnie, la "grise" pour les initiés. Je me rappelle d'un garçon qui avait toujours la pêche, humain, très sportif, le bon camarade par excellence... le type bien tout simplement. Nos chemins se sont recroisés plus tard en région PACA, lui affecté au PI2G à Orange (84), moi à la brigade de Sisteron (04). Nous avons eu l'occasion de servir sur les mêmes missions ou exercices, lui dans sa partie "inter" et moi dans la partie "négo".

Samedi matin, j'ai reçu une alerte négo justement où il était précisé qu'un forcené avait blessé sa compagne avec une arme à feu du côté de St-Tropez (83). Deux négociateurs régionaux se sont engagés ainsi que le PI2G (renommé Antenne Régionale du GIGN). Comme d'habitude, j'ai toujours un oeil sur l'inter en cours et j'ai vite appris qu'un camarade du peloton était tombé. Je ne sais pas pourquoi, j'ai de suite pensé avec inquiétude à toi Alain et j'ai écrit à mes collègues sur place "j'ai un camarade de promo au PI2G". J'ai su rapidement que tu nous avais quitté et j'ai repensé à la dernière fois qu'on s'était vu. C'est toujours dans ces instants-là qu'on se dit qu'on aurait dû plus profiter du dernier moment.

C'était à Orange, au mess de l'escadron. Tu étais avec un de tes fils, à table. On a papauté de nos vies, de nos parcours, de notre promo, en se marrant sur des anecdotes qui commencent à dater. On s'est quitté sur une bise en se promettant, comme souvent dans ces situations, de se faire "un truc" prochainement. C'est ma phrase ça : "il faut qu'on se fasse un truc!" mais je prends rarement le temps de profiter de mes collègues. On a tous un emploi du temps chargé mais dans ces moments-là, on regrette de ne pas avoir pris le temps. Cette dernière rencontre c'était en décembre dernier, on sortait d'une intervention à proximité de St-Tropez pour un homme qui avait tué un policier municipal avec une arme à feu suite à une dispute conjugale. L'homme avait fini par se suicider après avoir ouvert le feu sur les gendarmes. C'est sur une intervention similaire que tu perds la vie Alain. Depuis ce drame je repense en boucle à notre dernière rencontre. Depuis cette tragédie, je pense que tu laisses derrière toi une femme, deux petits bouts et une unité qui doit être totalement désemparée.

Nous avions le même âge. Nous avons tous les deux une femme et deux enfants. Nous étions de la même promo. Nous montions parfois sur les mêmes interventions. Je me dis que ça aurait pu être moi, je me dis que chaque intervention peut se terminer ainsi. En PACA, nous vivons tous avec le drame de Collobrières en tête, nous savons qu'une situation peut dégénérer soudainement et se dégrader d'une façon inattendue. Personne n'aurait pu prévoir que tu perdrais la vie ce samedi matin. Je suis touché, sous le choc, dans la peine depuis cette triste nouvelle. J'ai l'image de notre dernière discussion qui me hante. On n'imagine pas les répercussions qu'un décès peut avoir dans notre Institution.

J'ai lu chaque message de recueillement sur la page de l'association. Il ne s'agit que de beaux messages, parfois de personnes proches de toi qui te rendent ce dernier hommage avant une cérémonie où il te sera rendu les honneurs militaires que tu mérites. Je pense fort à toi, à ta femme et à tes fils, à ta famille, à ton unité. Au revoir camarade... veille sur les tiens depuis là-haut.

Tu restes dans ma mémoire Alain, je ne t'oublierai pas. Requiescat In Pace.

Lionel Delille, président d'AG&C.

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