Il fût un temps, pas si lointain, je regardais les patrouilles de gendarmerie qui passaient devant chez moi. De mes yeux d'enfant et de mon imagination débordante, des certitudes sont nées à chacun de leur passage. Je savais que ces hommes étaient des super-héros auxquels il valait mieux ne pas avoir affaire ! Je les imaginais si forts et entraînés que je les pensais capables de maîtriser à leurs seules force et technique n'importe quelle personne violente. Qu'ils pouvaient, même seuls, terrasser tous leurs adversaires. Je croyais que, quoi que l'on puisse faire comme bêtise, ils le sauraient forcément un jour grâce à leurs super-équipements à la pointe de la technologie, et qu'ils trouveraient n'importe quels coupables. Je pensais que leur parole était la même que celle de la justice, que si un gendarme prouvait que quelqu'un était hors la loi, elle irait forcément en prison après avoir été jugée. J'avais la certitude que répondre à un de ces super-héros ou faire preuve d'irrespect, voire pire, de violences, conduirait sûrement à l'enfermement et que personne n'était assez fou pour prendre un tel risque. Que ceux qui s'y hasarderaient, seraient traqués sans relâche. Et que ces gendarmes, de par leurs techniques et leur formation, combinées à leurs super-équipements et à une super-justice, enverraient l'auteur de ces méfaits directement en prison pour de longues périodes.
Aujourd'hui, je suis celui qui passe en patrouille devant la maison de mon enfance. Moi qui pensais faire partie de cette famille de super-héros, ma vocation reste intacte, mais de mes rêves il ne subsiste pas grand chose, tant le gouffre est immense.
Malheureusement, j'ai rapidement compris quelle était cette chose qui empêchait mon imagination d'enfant d'être une vraie réalité, et cette chose se nomme le budget. J'ai aussi rapidement trouvé une solution à cette chose, et elle se nomme la volonté.
Ces super-équipements que j'imaginais à la pointe de la technologie, se sont avérés être bien trop souvent des équipements obsolètes, plus du tout adaptés à leur époque, mais qui ne sont pas, ou peu, remplacés, la faute au budget qui a décidé, en l'absence de volonté de ceux qui délaissent la sécurité au profit d'autres ministères. Le peu d'équipements de pointe dont nous disposons, adaptés et appréciés sont malheureusement trop souvent en nombre insuffisant.
Ces super-formations que j'imaginais, et les super-entraînements sont de plus en plus rares, faute de temps pour les gendarmes, mais surtout faute de moyens. Les séances de tirs rarissimes en quantité et en qualité ( les cartouches coûtent un certain prix ! ), les cours de technique d'intervention et de maîtrise sans armes des adversaires devenus trop sporadiques pour qu'ils restent des automatismes dans certaines unités, faute de formateurs ou faute de temps, sont autant de conséquences de l'absence de volonté devant le budget.
Cette super-justice, dont j'osais croire suivre les preuves d'enquêtes des gendarmes et appliquer le code pénal sévèrement, s'avère minimiser les faits et souvent les peines. Les causes me dépassent forcément, mais de mon niveau, j 'entends bien trop souvent que c'est en raison du peu de places de prison, de l'individualisation des peines, etc... Mais que peut volonté sans budget ?
Cette chose que je pensais inimaginable à l'époque, agresser des gendarmes, sous peine de risquer une punition judiciaire est malheureusement devenue quelque chose de bien trop fréquent et pas ou peu réprimée. On peut aujourd'hui, par exemple brûler vifs des policiers dans leur véhicules de patrouille sans éprouver la moindre crainte d'une chasse à l'homme et rentrer chez soi, tranquillement.
Je pourrais énumérer encore nombre d'améliorations sécuritaires dont devraient bénéficier nos forces de l'ordre avec le budget à hauteur de la volonté.
Si ma vocation reste intacte, mes rêves sont écornés...........
J'ose encore croire à un sursaut de volonté face à budget. Il suffirait qu'ils s'entendent enfin pour que la réforme des institutions soit enfin réalisée. Mais ceci est un autre sujet, mon rêve d'adulte !