Manifestations interdites. Plongée au cœur d’une journée de violences
Les évènements récents de Sainte-Soline démontrent que, quelle que soit la posture des forces de sécurité, le maintien de l’ordre est une mission controversée, selon que l’on soit gendarme ou manifestant. Les uns revendiquent le respect du droit et la défense des intérêts de l’Etat, les autres, la liberté de dénoncer ce qu’ils estiment être une hérésie. Derrière ces positions, les politiques s’affrontent par petites mains interposées. D’un côté, des gendarmes, légitimes dans l’exécution de leurs missions régaliennes et les ordres reçus, de l’autre, des écologistes ou apparentés, forts de leurs certitudes et de leur bon droit. Ce face à face ne peut conduire qu’à une inévitable violente opposition.
Une fois la bataille terminée, les idéologues politiques prennent le pas sur les belligérants, les uns dénonçant les autres comme provocateurs du désordre et vice-versa. En attendant, ceux qui sont au cœur des affrontements, après avoir subi les agressions physiques, sont accusés de « violences policières » sur la base de vidéos parcellaires ou de témoignages manifestement orientés.
Puisque, très rarement, ceux qui reçoivent pour mission de protéger les installations ou les personnes, n’expriment pas leur ressenti, nous avons fait le choix de reproduire le récit d’un gendarme mobile qui se trouvait dans le dispositif.
Plongée au cœur d’une journée de guerre rurale !
« Arrivés sur le site des bassines à Ste Soline le vendredi 24 mars, nous occupons immédiatement le terrain en réalisant un contrôle de zone. Cette première journée nous permet de nous imprégner du périmètre à défendre, d’en repérer les accès et d’envisager des hypothèses. Nous sommes très nombreux.
De nombreuses vérifications sur la totalité des axes sont effectuées afin de renseigner les autorités et d’empêcher toute pénétration d’engins ou d’objets dangereux dans la zone.
Les informations qui nous parviennent sont inquiétantes. Ceux qui pourraient s’identifier comme nos adversaires seront très nombreux, bien équipés, organisés et entraînés. Des tracts sont distribués par les organisateurs aux participants. Des vidéos des regroupements circulent déjà sur les réseaux. Les plus radicalisés veulent se faire du gendarme. Nous en sommes conscients, comme à chaque fois.
Les rappels sur les cadres légaux d’utilisation de la force sont faits à plusieurs reprises par les chefs d’unité et martelés tout au long de notre préparation matérielle. Le sommeil est entrecoupé par les rondes de sécurité et les gardes statiques. La nuit est de courte durée.
Au petit matin, le samedi 25 mars, nous sommes en position de défense ferme autour de la bassine. Nous apercevons au loin plusieurs cortèges converger vers le lieu où nous sommes installés. Je ressens parmi mes camarades de l’inquiétude. Les regards ne trompent pas. Ils sont concentrés. Ils écoutent les dernières consignes. Les manifestants se regroupent déjà face à nous. Devant la masse humaine bruyante, inquiétante, impressionnante, plus personne ne parle dans les rangs.
Nous encaissons immédiatement un premier choc d’une violence inouïe. Les projectiles en tout genre pleuvent et s’abattent sans discontinuer sur nos protections. Les mortiers d’artifices frôlent nos casques, éclatent dans nos jambes. Pourtant personne ne bronche. Nos adversaires se rapprochent dangereusement près de nous. Ils portent des objets incendiaires. Il faut réagir, vite.
Nous répliquons par des tirs de gaz lacrymogène qui se révèlent inefficaces. Les black-blocs ont revêtu des équipements de protection du même niveau que les nôtres. Les seules munitions qui semblent les repousser sont les grenades avec effet de souffle. Ils décident alors de contourner notre dispositif afin de trouver une faille. Une pluie de cocktails molotov ainsi que des grenades incendiaires s’abat à nouveau sur nos véhicules. Plusieurs s’embrasent. Cela a pour effet de créer une brèche dans le cordon de sécurité. La chaleur intenable nous empêche de combler l’ouverture. J’aperçois à travers la visière de mon casque, ici des camarades en feu, là des gendarmes blessés, allongés sur le sol, sans connaissance. Le temps s’écoule au ralenti, au milieu des hurlements et du fracas des explosifs que l’on nous projette. J’ai l’impression d’être l’acteur d’un film de guerre.
Devant ces scènes de chaos, chacun de ceux qui sont encore debout expriment leur motivation en tenant bon face à ce qu’ils subissent. Ils sont admirables de détermination.
Un seul mot d’ordre : « ILS NE PASSERONT PAS »
Au loin, je vois les gendarmes départementaux des équipes judiciaires évacuer les blessés, se mettre à notre disposition pour ravitailler en munitions, prendre les boucliers des blessés évacués pour se protéger.
Les motards des BMO et de la garde républicaine font des norias sur leur engin, dans la boue. Ils transportent sur leurs cuisses les caisses de munitions qui nous font défaut. Nos camarades CRS, au pied de leur canon à eau, ont sorti les boucliers et se protègent comme ils le peuvent des attaques successives des belligérants. La bataille fait rage.
Les black-block s’approchent dangereusement à nouveau de la dernière clôture. Ils sont aussi nombreux que déterminés. Trois pelotons de trois escadrons différents accourent en renfort de l’intérieur de la bassine et s’interposent. Ils subissent un feu nourri d’engins explosifs improvisés de la part de l’adversaire. Malgré ce déluge de projectiles, ils tiennent la ligne de contact. Une dizaine de tirs de grenades à effet de souffle parviennent à arrêter les agresseurs. Ils refluent dans le désordre. Les assauts se succèdent de tous les côtés. Puis le calme revient. ILS NE SONT PAS PASSÉS ! »
Ce récit poignant apporte un éclairage différent des discours dogmatiques des responsables politiques qui manifestaient au côté des agresseurs. Dans un état de droit, les gendarmes garantissent la sécurité des personnes et des biens. Ils n’ont pas d’état d’âme quant au bien-fondé de leurs missions, car elles sont légales. Que des responsables politiques les accusent systématiquement d’exercer des violences ne doit pas faire oublier que derrière chacun d’eux, il y a un père, une mère, un parent, qui agit au nom d’une certaine idée des valeurs humaines et républicaines. L’APNM Gendarmes et Citoyens défendra toujours les membres de la communauté Gendarmerie. Elle combattra avec la plus grande fermeté toutes les attaques indignes contre ceux qui sont au service de l’état de droit.
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