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Autocharges : Le Louvois de la gendarmerie ?


Depuis plusieurs mois, AG&C est régulièrement sollicitée au sujet d'avis de régularisation de charges de logements NAS. En fait, une loi modificative parue en 2014 prescrit un certain nombre de contraintes au bailleur concernant la communication des décomptes et doit en informer dans les plus brefs délais le locataire. La gendarmerie, lorsqu'elle n'est pas propriétaire des casernements qu'elle met à disposition de ses personnels, est considérée comme étant le locataire vis à vis de la réglementation. Cette mise à disposition n'est pas soumise aux contraintes de la Loi dite Alur parce qu'elle entre dans le cadre d'un accord entre l'employeur et son salarié. Et c'est là toute la difficulté de ces concessions par nécessité absolue de service. Cette situation est paradoxale pour les raisons suivantes. La gendarmerie est locataire d'un bien appartenant à autrui. Elle entre donc dans le cadre de la loi de 1989, modifiée en 2014, mais les gendarmes qu'elle est dans l'obligation de loger en sont exclus et n'ont d'autres recours que le code civil et une vieille disposition législative de 1968, concernant les créances de l'état. Nous sommes donc confrontés à une incongruité systémique, notamment dans le cadre de locations à des bailleurs civils. Ils fournissent des états de régularisation à l'administration chaque début d'année. Il appartient ensuite aux services de soutien de procéder à la répartition des charges entre les parties prenantes individuelles et les locaux de service. La mise en place d'un outil informatique révolutionnaire (AUTOCHARGES) en remplacement d'une application vieillissante (GESTCHAR), avait été présentée comme une innovation moderne qui devait, à terme, réduire les délais très sensiblement. Pour information, les agences immobilières et les bailleurs sociaux fournissent dans le premier trimestre de l'année A+1, un état de régularisation des charges à leurs locataires. Si l'on peut concevoir un normal retard à l'allumage dans la mise en œuvre d'une nouvelle application, il est incompréhensible qu'en 2018, on réclame des apurements de charges de chauffage et d'eau chaude de 2013. Le retard accumulé lors des années précédentes n'a donc pas été rattrapé et plus grave, il s'est accentué. Il faut remarquer deux énormes écueils dans cette situation.


· La règle en matière de régularisation des charges est simple. On calcule le nouvel appel en multipliant par 1,1 le coût total des fluides de l'année précédente et on divise par 12 mois, pour l'année suivante. Cette méthode évite à l'occupant d'avoir des surprises en anticipant les futurs apurements. C'est d'ailleurs l'usage dans la comptabilité des bailleurs, syndics ou autres loueurs sociaux ou privés. Adresser des états de régularisation des charges quatre ans après la clôture de l'année de référence induit non seulement des tracas financiers pour les familles mais un sentiment d'injustice lié essentiellement à l'absence d'explications.


· Elle constitue également un manque d'anticipation sur les coûts des ingrédients entre 2013 et 2018. L'augmentation naturelle des combustibles et de l'énergie est un vecteur à prendre en compte chaque année pour établir le montant des charges. En outre, il n'a pas pu être tenu compte de celle-ci pour étalonner les appels de charges. Dans le cas de figure actuel, il faudra attendre 2019 pour connaître celles de 2014.


Cet état de fait, qui semble ne pas évoluer, année après année, n'étonne apparemment pas les services de soutien. La plupart du temps, au préjudice de la situation financière des familles, il pousse les occupants à demander un échelonnement des sommes dues et obère leur pouvoir d'achat durablement. Doit-on expliquer que, si les états de l'année de référence étaient rédigés en début d'année + 1, chaque occupant pourrait aligner le curseur de son appel de charges.


Il était un temps où dans les casernes domaniales, les commandants d'unité établissaient en début d'année le procès-verbal de répartition de charges. Ils passaient un temps non négligeable mais l'apurement était validé dans l'année A+1 et tout le monde s'en félicitait. Ils l'établissaient manuellement, sans application métier et en concordances avec les factures qu'ils avaient reçues. Grâce aux progrès des outils informatiques, la même tâche est réalisée maintenant cinq ans après l'arrêt des comptes.


En 2018, on apure donc, dans la grande majorité des régions, l'année 2013, sans véritables explications, sinon que les services spécialisés sont en surchauffe ou qu'il leur manque des documents comptables (factures, bon de livraison, etc.) Nous prend-on pour des abrutis (n'ayons pas peur des mots!) ? Une société qui livre du fuel domestique, par exemple, va attendre plusieurs années pour transmettre sa facture ? Ou alors les services des finances règlent-ils le coût de la livraison sans documents comptables ? Qui peut le croire ? D'autant qu'en opposant cette difficulté aux remarques justifiées, les services compétents excluent, de fait leur responsabilité.


On peut les inviter à relire plusieurs fois, le cas échéant, la circulaire 102.000 qu'ils exhibent dès qu'on les sollicite pour une éventuelle explication. Elle précise, entre autre chose, que « Le centre administratif et financier zonal de la gendarmerie ou organisme assimilé... règle les factures (eau, chauffage et électricité, etc.) et procède au recouvrement des charges (appels de charges, régularisation) auprès des PPI. » ou encore « La formation administrative prélève, par précomptes de charges sur la solde (9), le montant correspondant aux provisions de charges. Ce montant est réactualisé annuellement à partir de la régularisation des PPI de l'année précédente. » et pour finir « En principe, la régularisation de charges intervient annuellement au cours de l'année qui suit la gestion à régulariser, de telle sorte que chaque occupant connaisse rapidement le montant exact du remboursement ou de l'imputation supplémentaire le concernant. Elle est notifiée à l'occupant pour prise de connaissance et peut être contestée dans les conditions fixées aux articles R. 4125-1 et suivants du code de la défense. »


Illustrer par un dessin ce qui est une évidence paraîtrait à ce stade de la démonstration comme un affront à l'intelligence des spécialistes ? Les régularisations de charges doivent être établies ANNUELLEMENT. Et si on peut accepter qu'un retard lié à l'on ne sait quelles raisons techniques allonge ce délai de quelques mois, il est inconcevable de ne recevoir des états 5 ans après l'arrêt de l'imputation. Ah oui, c'est vrai, on oublie que les fournisseurs de gaz, de fuel ou d'électricité sont des misanthropes qui attendent plusieurs années pour adresser leurs factures !


On ne peut plus se contenter d'un tel argument, s'agissant de dispositions réglementaires qui touchent au portefeuille des gendarmes. Il est tout à fait juste que les charges d'un logement soient supportées par ceux qui les consomment, en revanche, il n'est pas normal que les régularisations interviennent plusieurs années après leur clôture.


Un autre sujet a été soumis à la sagacité des membres de AG&C. Il s'agit de la gestion des casernes bénéficiant d'un réseau de chaleur (également appelé chauffage urbain). Bien plus technique (opaque?) ce nouveau procédé de chauffage répond essentiellement à des critères d'économie et à la préservation écologique de l'environnement. La part récupérable de la consommation se décline en 3 postes : La consommation proprement dite et l'abonnement (R1), l'entretien courant et les réparations (R2) et les gros frais d'entretien et le renouvellement (R3). La gendarmerie impute le coût des postes R1 et R2 sur l'occupant (le gendarme) et prend en charges le poste R3, comme l'exige la Loi Alur. Elle applique donc des règles édictées par une loi qui exclue de son champ d'action les logements dits de fonction. En effet, la circulaire 102.000 (1) ne prescrit que la récupération des consommations et abonnements éventuels sur le compte des parties prenantes individuelles. Il y a certainement matière à déposer des recours sur cette anomalie d'interprétation à géométrie variable d'un texte qui ne concerne pas les gendarmes. Toutes ces difficultés - on peut même évoquer de graves dysfonctionnements - génèrent une colère et un sentiment d'injustice de la part de ceux qui paient sur leurs deniers le manque d'anticipation, l'insuffisance ou les dérives d'un système n'offrant plus aucune crédibilité. Et les différentes interventions des « sachant » comme il est habituel de les désigner, ne sont pas rassurantes. En 2014, ils nous vendaient un produit qui devait résoudre toutes les impérities des vieux logiciels de gestion de charges. On est loin du compte.


AG&C attire solennellement l'attention de la direction générale de la Gendarmerie Nationale sur ce sujet. Il devient urgent de pallier les carences de gestion en priorisant les apurements des charges de 2014 à 2017.

Quand on veut restaurer la confiance, on doit faire montre de la capacité à relever les défis.


Capitaine (ER) Jean-François CHARRAT - Rédacteur en chef

(Chargé des saisines « Rappels de charges » pour AG&C)


(1) Chauffage urbain : Le prix de vente TTC de la chaleur (correspondant, sur les factures, aux prestations P.1 ou R.1) et les primes fixes liées à la prestation fournie sont répartis entre tous les utilisateurs exclusivement au prorata des surfaces et du nombre de jours de chauffage de chacun. Les autres postes (correspondant, sur les factures, aux prestations P.2 ou R.2) et éventuellement (P.3) - gros entretien renouvellement - sont supportés par le budget de fonctionnement de la formation administrative.




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